Une tradition millénaire
L’histoire a surtout retenu les architectures grandioses en pierre des égyptiens, grecs et romains, ou encore les cathédrales gothiques.
Pourtant, la majorité des constructions domestiques qui ont entouré ces monuments étaient en terre crue.
L’utilisation de la terre pour construire est attestée depuis au moins 11 000 ans en Mésopotamie.
D’abord utilisée pour construire des petits groupes d’habitations, la terre va aussi servir à construire des villes comme Mari ou Qatna dans l’actuelle Syrie, des temples, des fortifications, des palais, grâce au développement de la brique de terre moulée puis au développement des arcs et voûtes. Cette brique a parfois été produite en des millions d’exemplaires pour les besoins d’un seul de ces ouvrages, parfois cachées par une façade en briques de terres cuites (la porte d’Ishtar à Babylone).
L’urbanisation est associée à l’utilisation de ces briques de terre, qui vont se diffuser en Asie Centrale (Nisa, Merv), en Afrique le long de la vallée du Nil (Kerma, Bouhen, greniers du Ramesseùm de Louxor) puis vers l’Europe. On retrouve aussi une diffusion de la brique de terre, associée à un développement de l’urbanisation, en amérique centrale et amérique du sud. Un des exemples emblématiques de cette architecture est le site de Chan Chan au Pérou : 20 km² de palais bâtis en briques et pisé dont l’apogée se situe il y a 700 ans.
C’est aussi en partie en pisé qu’un des monuments les plus connus au monde a été construit : la Grande Muraille de Chine. Là aussi, la terre crue a été un matériau de base pour l’édification des villes et villages dans de nombreuses régions.
Largement utilisée par les Celtes, l’utilisation de terre en remplissage d’ossatures en bois est une technique de torchis très utilisée en Europe depuis des milliers d’années, qui a été largement employée, avec des adaptations techniques locales et régionales, pour fermer les enveloppes de bâtiments construits en bois.
La diffusion du pisé, sans doute en provenance de Carthage, et des briques, va donner un paysage où de nombreuses techniques de construction en terre coexistent pour bâtir l’habitat rural comme urbain, qui vont perdurer jusqu’au XXème siècle : au-delà de nombreuses fermes, moulins, et autres bâtiments ruraux construits en terre, on trouve encore du bâti urbain en pisé à Perpignan, Béziers, Lyon.
Lors de la révolution industrielle une systématisation des techniques tend à mettre en avant le pisé, perçu comme une technique de construction saine, économique et économe en ressources (notamment en bois, largement exploité pour satisfaire les besoins en énergie notamment). La diffusion de cette technique de part le monde va suivre les flux des colons européens, apportant avec eux des savoir-faire et des ouvrages comme ceux de François Cointeraux.
Ce processus va se poursuivre et prendre de l’ampleur au début du XXème siècle, écartant peu à peu le pisé pour le béton de ciment. La sortie des conflits mondiaux, en particulier le second, seront des occasions de réinventer les utilisations de la terre crue dans la construction pour faire face au besoin immédiat de reconstruction massive : le pisé et la terre allégée seront ainsi utilisés, en particulier en Allemagne.